Peuples, faites silence ! (Envoi de M. Sabô, de Bordeaux, médium madame Cazemajoux.)I
Où courent ces
enfants revêtus de robes blanches ? la joie illumine leurs cœurs ; leur
essaim folâtre va s'ébattre dans les vertes prairies où ils feront une
ample moisson de fleurs et poursuivront l'insecte brillant qui se
nourrit dans leurs calices. Insouciants et heureux, ils ne voient pas
plus loin que l'horizon bleu qui les entoure ; leur chute sera terrible,
si vous ne vous hâtez de disposer leurs cœurs aux enseignements
spirites ;
Car les Esprits du Seigneur ont passé à travers les
nues et viennent vous prêcher ; prêtez l'oreille à leurs voix amies ;
écoutez attentivement ; peuples, faites silence !
II
Ils sont devenus grands et forts ; la mâle beauté des uns, la grâce et
l'abandon des autres font revivre dans le cœur des pères les doux
souvenirs d'une époque déjà éloignée d'eux, mais le sourire qui allait
s'épanouir sur leurs lèvres flétries disparaît pour faire place aux
sombres soucis. C'est qu'eux aussi, ils ont bu à longs traits dans la
coupe enchantée des illusions de la jeunesse, et son poison subtil a
appauvri leur sang, énervé leurs forces, vieilli leurs visages, dégarni
leurs fronts, et ils voudraient empêcher leurs fils de goûter à cette
coupe empoisonnée. Frères ! le Spiritisme sera l'antidote qui doit
préserver la nouvelle génération de ses mortels ravages ;
Car
les Esprits du Seigneur ont passé à travers les nues et viennent vous
prêcher ; prêtez l'oreille à leurs voix amies ; écoutez attentivement ;
peuples, faites silence !
III
Ils ont atteint l'âge de la virilité ; ils sont devenus hommes ; ils
sont sérieux et graves, mais ils ne sont pas heureux ; leur cœur est
blasé et n'a qu'une fibre sensible : celle de l'ambition. Ils emploient
tout ce qu'ils ont de force et d'énergie à acquérir des biens
terrestres. Pour eux, pas de bonheur sans les dignités, les honneurs, la
fortune. Insensés ! D'un instant à l'autre, l'ange de la délivrance va
vous frapper ; vous serez forcés d'abandonner toutes ces chimères ; vous
êtes des proscrits que Dieu peut rappeler d'un instant à l'autre dans
la mère patrie. Ne bâtissez ni palais ni monuments ; une tente, des
vêtements et du pain, voilà le nécessaire. Contentez-vous de cela, et
avec votre superflu donnez à vos frères qui en manquent : l'abri, le
vêtement et le pain. Le Spiritisme vient vous dire que les véritables
trésors que vous devez acquérir sont l'amour de Dieu et du prochain ;
ils vous feront riches pour l'éternité ;
Car les Esprits du
Seigneur ont passé à travers les nues et viennent vous prêcher ; prêtez
l'oreille à leurs voix amies ; écoutez attentivement ; peuples, faites
silence !
IV
Ils ont leurs fronts penchés sur le bord du sépulcre ; ils ont peur et
voudraient relever la tête, mais le temps a voûté leurs épaules, raidi
leurs nerfs et leurs muscles, et ils sont impuissants à regarder en
haut. Ah ! quelles angoisses viennent les assaillir ! Ils repassent dans
le secret de leur âme leur vie inutile et souvent criminelle ; le
remords les ronge comme un vautour affamé ; c'est qu'ils ont souvent,
dans le cours de cette existence écoulée dans l'indifférence, nié leur
Dieu, et il leur apparaît au bord de la tombe, vengeur inexorable. Ne
craignez pas, Frères, et priez. Si dans sa justice, Dieu vous châtie, il
fera grâce à votre repentir, car le Spiritisme vient vous dire que
l'éternité des peines n'existe pas, et que vous renaissez pour vous
purifier et expier. Aussi, vous qui êtes fatigués de votre exil sur la
terre, faites tous vos efforts pour vous améliorer afin de n'y plus
revenir ;
Car les Esprits du Seigneur ont passé à travers les
nues et viennent vous prêcher ; prêtez l'oreille à leurs voix amies ;
écoutez attentivement ; peuples, faites silence !
Byron.