De l'influence morale des médiums dans les communications (Société Spirite de Paris. Médium M. d'Ambel.)
Nous l'avons déjà dit : les médiums, en tant que médiums, n'ont qu'une influence secondaire dans les communications des Esprits ; leur tâche est celle d'une machine électrique, qui transmet les dépêches télégraphiques d'un point éloigné à un autre point éloigné de la terre. Ainsi, quand nous voulons dicter une communication, nous agissons sur le médium, comme l'employé du télégraphe sur son appareil ; c'est-à-dire que de même que le tac tac du télégraphe dessine à des milliers de lieues, sur une bande de papier, les signes reproducteurs de la dépêche, de même nous communiquons à travers les distances incommensurables qui séparent le monde visible du monde invisible, le monde immatériel du monde incarné, ce que nous voulons vous enseigner au moyen de l'appareil médianimique. Mais aussi, de même que les influences atmosphériques agissent, et troublent souvent les transmissions du télégraphe électrique, l'influence morale du médium agit, et trouble quelquefois la transmission de nos dépêches d'outre-tombe ; parce que nous sommes obligés de les faire passer par un milieu qui leur est contraire. Cependant, le plus souvent cette influence est annulée par notre énergie et notre volonté, et aucun acte perturbateur ne se manifeste. En effet, des dictées d'une haute portée philosophique, des communications d'une parfaite moralité, sont transmises quelquefois par des médiums peu propices à ces enseignements supérieurs ; tandis que, d'un autre côté, des communications peu édifiantes arrivent aussi quelquefois par des médiums tout honteux de leur avoir servi de conducteur.
En thèse générale, on peut affirmer que les Esprits similaires appellent les Esprits similaires, et que rarement les Esprits des pléiades élevées se communiquent par des appareils mauvais conducteurs, quand ils ont sous la main de bons appareils médianimiques, de bons médiums en un mot.
Les médiums légers et peu sérieux appellent donc des Esprits de même nature ; c'est pourquoi leurs communications sont empreintes de banalités, de frivolités, d'idées sans suite et souvent fort hétérodoxes, spiritement parlant. Certes, ils peuvent dire et disent quelquefois de bonnes choses ; mais c'est dans ce cas surtout qu'il faut apporter un examen sévère et scrupuleux, car, au milieu de ces bonnes choses, certains Esprits hypocrites insinuent avec habileté et avec une perfidie calculée des faits controuvés, des assertions mensongères, afin de duper la bonne foi de leurs auditeurs. On doit alors élaguer sans pitié tout mot, toute phrase équivoques, et ne conserver de la dictée que ce que la logique accepte, ou ce que la doctrine a déjà enseigné. Les communications de cette nature ne sont à redouter que pour les Spirites isolés, les groupes récents ou peu éclairés, car, dans les réunions où les adeptes sont plus avancés et ont acquis de l'expérience, le geai a beau se parer des plumes du paon, il est toujours impitoyablement éconduit.
Je ne parlerai pas des médiums qui se plaisent à solliciter et à écouter des communications ordurières ; laissons-les se complaire dans la société des Esprits cyniques. D'ailleurs, les communications de cet ordre recherchent d'elles-mêmes la solitude et l'isolement ; elles ne pourraient, en tout cas, que soulever le dédain et le dégoût parmi les membres des groupes philosophiques et sérieux. Mais où l'influence morale du médium se fait réellement sentir, c'est quand celui-ci substitue ses idées personnelles à celles que les Esprits s'efforcent de lui suggérer ; c'est encore lorsqu'il puise dans son imagination des théories fantastiques qu'il croit lui-même, de bonne foi, résulter d'une communication intuitive. Il y a souvent alors mille à parier contre un que ceci n'est que le reflet de l'Esprit personnel du médium ; et il arrive même ce fait curieux, c'est que la main du médium se meut quelquefois presque mécaniquement, poussée qu'elle est par un Esprit secondaire et moqueur. C'est contre cette pierre de touche que viennent se briser les imaginations jeunes et ardentes ; car, emportés par la fougue de leurs propres idées, par le clinquant de leurs connaissances littéraires, ils méconnaissent la modeste dictée d'un sage Esprit, et abandonnant la proie pour l'ombre, y substituent une paraphrase ampoulée. C'est contre cet écueil redoutable que viennent également échouer les personnalités ambitieuses qui, à défaut des communications que les bons Esprits leur refusent, présentent leurs propres œuvres comme l'œuvre de ces Esprits eux-mêmes. Voilà pourquoi il faut que les chefs des groupes Spirites soient pourvus d'un tact exquis et d'une rare sagacité, pour discerner les communications authentiques de celles qui ne le sont pas, et pour ne pas blesser ceux qui se font illusion à eux-mêmes.
Dans le doute, abstiens-toi, dit un de vos anciens proverbes ; n'admettez donc que ce qui est pour vous d'une évidence certaine. Dès qu'une opinion nouvelle se fait jour, pour peu qu'elle vous semble douteuse, passez-la au laminoir de la raison et de la logique ; ce que la raison et le bon sens réprouvent, rejetez-le hardiment ; mieux vaut repousser dix vérités, qu'admettre un seul mensonge, une seule fausse théorie. En effet, sur cette théorie vous pourriez édifier tout un système qui croulerait au premier souffle de la vérité comme un monument bâti sur un sable mouvant ; tandis que, si vous rejetez aujourd'hui certaines vérités, parce qu'elles ne vous sont pas démontrées logiquement et clairement, bientôt un fait brutal ou une démonstration irréfutable viendra vous en affirmer l'authenticité.
Rappelez-vous, néanmoins, ô Spirites, qu'il n'y a d'impossible pour Dieu et pour les bons Esprits que l'injustice et l'iniquité.
Le Spiritisme est assez répandu maintenant parmi les hommes, et a suffisamment moralisé les adeptes sincères de sa sainte doctrine, pour que les Esprits ne soient plus réduits à employer de mauvais outils, des médiums imparfaits. Si donc maintenant un médium, quel qu'il soit, donne, par sa conduite ou ses mœurs, par son orgueil, par son manque d'amour et de charité, un légitime sujet de suspicion, repoussez, repoussez, ses communications, car il y a un serpent caché dans l'herbe. Voilà ma conclusion sur l'influence morale des médiums.
Éraste.
Des apports et des autres phénomènes tangibles (Société spirite de Paris. Médium M. d'Ambel.)
Il faut nécessairement, pour obtenir des phénomènes de cet ordre, avoir avec soi des médiums que j'appellerai sensitifs, c'est-à-dire, doués au plus haut degré des facultés médianimiques d'expansion et de pénétrabilité ; parce que le système nerveux de ces médiums, facilement excitable, leur permet, au moyen de certaines vibrations, de projeter autour d'eux, avec profusion, leur fluide animalisé.
Les natures impressionnables, les personnes dont les nerfs vibrent au moindre sentiment, à la plus petite sensation, que l'influence morale ou physique, interne ou externe, sensibilise, sont des sujets très aptes à devenir d'excellents médiums pour les effets physiques de tangibilité et d'apports. En effet, leur système nerveux, presque entièrement dépourvu de l'enveloppe réfractaire, qui isole ce système chez la plupart des autres incarnés, les rend propres au développement de ces divers phénomènes. En conséquence, avec un sujet de cette nature, et dont les autres facultés ne sont pas hostiles à la médianimisation, on obtiendra plus facilement les phénomènes de tangibilité, les coups frappés dans les murs et dans les meubles, les mouvements intelligents, et même la suspension dans l'espace de la matière inerte la plus lourde ; à fortiori, obtiendra-t-on ces résultats si, au lieu d'un médium, on en a sous la main plusieurs également bien doués.
Mais de la production de ces phénomènes à l'obtention de celui des apports, il y a tout un monde ; car, dans ce cas, non seulement le travail de l'Esprit est plus complexe, plus difficile, mais bien plus, l'Esprit ne peut opérer qu'au moyen d'un seul appareil médianimique, c'est-à-dire que plusieurs médiums ne peuvent pas concourir simultanément à la production du même phénomène. Il arrive même, au contraire, que la présence de certaines personnes antipathiques à l'Esprit qui opère entrave radicalement son opération. A ces motifs qui, comme vous le voyez, ne manquent pas d'importance, ajoutez que les apports nécessitent toujours une plus grande concentration et en même temps une plus grande diffusion de certains fluides, et qu'enfin ils ne peuvent être obtenus qu'avec les médiums les mieux doués, ceux, en un mot, dont l'appareil électro-médianimique est le mieux conditionné.
En général, les faits d'apports sont et resteront excessivement rares. Je n'ai pas besoin de vous démontrer pourquoi ils sont et seront moins fréquents que les autres faits de tangibilité ; de ce que je dis vous le déduirez vous-mêmes. D'ailleurs, ces phénomènes sont d'une nature telle, que non seulement tous les médiums n'y sont pas propres, mais que tous les Esprits eux-mêmes ne peuvent pas les produire. En effet, il faut qu'entre l'Esprit et le médium influencé il existe une certaine affinité, une certaine analogie, en un mot une certaine ressemblance qui permette à la partie expansible du fluide périspritique
[1] de l'incarné de se mêler, de s'unir, de se combiner avec celui de l'Esprit qui veut faire un apport. Cette fusion doit être telle que la force résultante devienne, pour ainsi dire, une ; de même qu'un courant électrique, en agissant sur le charbon, produit un foyer, une clarté uniques.
Pourquoi cette union ? pourquoi cette fusion, direz-vous ? C'est que, pour la production de ces phénomènes, il faut que les propriétés essentielles de l'Esprit moteur soient augmentées de quelques-unes de celles du médianimisé ; c'est que le fluide vital, indispensable à la production de tous les phénomènes médianimiques, est l'apanage exclusif de l'incarné, et que, par conséquent, l'Esprit opérateur est obligé de s'en imprégner. Ce n'est qu'alors qu'il peut, au moyen de certaines propriétés de votre milieu ambiant, inconnues pour vous, isoler, rendre invisibles et faire mouvoir certains objets matériels, et des incarnés eux-mêmes.
Il ne m'est pas permis, pour le moment, de vous dévoiler ces lois particulières qui régissent les gaz et les fluides qui vous environnent ; mais avant que des années soient écoulées, avant qu'une existence d'homme soit accomplie, l'explication de ces lois et de ces phénomènes vous sera révélée, et vous verrez surgir et se produire une nouvelle variété de médiums, qui tomberont dans un état cataleptique particulier dès qu'ils seront médianimisés.
Vous voyez de combien de difficultés la production des apports se trouve entourée ; vous pouvez en conclure très logiquement que les phénomènes de cette nature sont excessivement rares, et avec d'autant plus de raison que les Esprits s'y prêtent fort peu, parce que cela motive de leur part un travail quasi matériel, ce qui est un ennui et une fatigue pour eux. D'autre part, il arrive encore ceci : c'est que très souvent, malgré leur énergie et leur volonté, l'état du médium lui-même leur oppose une barrière infranchissable.
Il est donc évident, et votre raisonnement le sanctionne, je n'en doute pas, que les faits tangibles de coups, de mouvement et de suspension sont des phénomènes simples, qui s'opèrent par la concentration et la dilatation de certains fluides, et qu'ils peuvent être provoqués et obtenus par la volonté et le travail des médiums qui y sont aptes, quand ceux-ci sont secondés par des Esprits amis et bienveillants ; tandis que les faits d'apports sont multiples, complexes, exigent un concours de circonstances spéciales, ne peuvent s'opérer que par un seul Esprit et un seul médium, et nécessitent, en dehors des besoins de la tangibilité, une combinaison toute particulière pour isoler et rendre invisible l'objet ou les objets qui font le sujet de l'apport.
Vous tous, Spirites, vous comprenez mes explications, et vous vous rendez parfaitement compte de cette concentration de fluides spéciaux, pour la locomotion et la tactilité de la matière inerte ; vous y croyez, comme vous croyez aux phénomènes de l'électricité et du magnétisme, avec lesquels les faits médianimiques sont pleins d'analogie, et en sont, pour ainsi dire, la consécration et le développement. Quant aux incrédules, je n'ai que faire de les convaincre, je ne m'occupe pas d'eux ; ils le seront un jour, par la force de l'évidence, car il faudra bien qu'ils s'inclinent devant le témoignage unanime des faits spirites, comme ils ont été forcés de le faire devant tant d'autres faits qu'ils avaient d'abord repoussés.
Pour me résumer : si les faits de tangibilité sont fréquents, les faits d'apports sont très rares, parce que les conditions en sont très difficiles ; par conséquent, nul médium ne peut dire : A telle heure, à tel moment, j'obtiendrai un apport ; car souvent l'Esprit lui-même se trouve empêché dans son œuvre. Je dois ajouter que ces phénomènes sont doublement difficiles en public, car on y rencontre presque toujours des éléments énergiquement réfractaires qui paralysent les efforts de l'Esprit, et à plus forte raison l'action du médium. Tenez, au contraire, pour certain, que ces phénomènes se produisent spontanément ; le plus souvent à l'insu des médiums et sans préméditation, presque toujours en particulier, et enfin, fort rarement, quand ceux-ci en sont prévenus ; d'où vous devez conclure qu'il y a motif légitime de suspicion, toutes les fois qu'un médium se flatte de les obtenir à volonté, autrement dit, de commander aux Esprits comme à des serviteurs, ce qui est tout simplement absurde. Tenez encore pour règle générale que les phénomènes spirites ne sont point faits pour être donnés en spectacle et pour amuser les curieux. Si quelques Esprits se prêtent à ces sortes de choses, ce ne peut être que pour des phénomènes simples, et non pour ceux qui, comme les apports et autres semblables, exigent des conditions exceptionnelles.
Rappelez-vous, Spirites, que s'il est absurde de repousser systématiquement tous les phénomènes d'outre-tombe, il n'est pas sage non plus de les accepter tous aveuglément. Quand un phénomène de tangibilité, d'apparition, de visibilité ou d'apport se manifeste spontanément et d'une manière instantanée, acceptez-le ; mais, je ne saurais trop vous le répéter, n'acceptez rien aveuglément ; que chaque fait subisse un examen minutieux, approfondi et sévère ; car, croyez-le, le Spiritisme, si riche en phénomènes sublimes et grandioses, n'a rien à gagner à ces petites manifestations que d'habiles prestidigitateurs peuvent imiter.
Je sais bien ce que vous allez me dire : c'est que ces phénomènes sont utiles pour convaincre les incrédules ; mais sachez bien que si vous n'aviez pas eu d'autres moyens de conviction, vous n'auriez pas aujourd'hui la centième partie des Spirites que vous avez. Parlez au cœur ; c'est par là que vous ferez le plus de conversions sérieuses. Si vous croyez utile, pour certaines personnes, d'agir par les faits matériels, présentez-les au moins dans des circonstances telles qu'ils ne puissent donner lieu à aucune fausse interprétation, et surtout ne sortez pas des conditions normales de ces faits ; car les faits présentés dans de mauvaises conditions fournissent des arguments aux incrédules au lieu de les convaincre.
Eraste.
Les animaux médiums (Société spirite de Paris. Médium M. d'Ambel.)
J'aborde aujourd'hui cette question de la médianimité des animaux, soulevée et soutenue par un de vos plus fervents adeptes. Il prétend, en vertu de cet axiome, qui peut le plus peut le moins, que nous pouvons médianimiser les oiseaux et les autres animaux, et nous en servir dans nos communications avec l'espèce humaine. C'est ce que vous appelez en philosophie, ou plutôt en logique, purement et simplement un sophisme.
« Vous animez, dit-il, la matière inerte, c'est-à-dire, une table, une chaise, un piano ; à fortiori devez-vous animer la matière déjà animée et notamment des oiseaux. » Eh bien ! dans l'état normal du Spiritisme, cela n'est pas, cela ne peut pas exister.
D'abord, convenons bien de nos faits. Qu'est-ce qu'un médium ? C'est l'être, c'est l'individu qui sert de trait d'union aux Esprits, pour que ceux-ci puissent avec facilité se communiquer aux hommes : Esprits incarnés. Par conséquent, sans médium, point de communications tangibles, mentales, scriptives, physiques, ni de quelque sorte que ce soit.
Il est un principe qui, j'en suis sûr, est admis par tous les Spirites : c'est que les semblables agissent avec leurs semblables et comme leurs semblables. Or, quels sont les semblables des Esprits, sinon les Esprits, incarnés ou non ? Faut-il vous le répéter sans cesse ? Eh bien ! je vous le répéterai encore : Votre périsprit et le nôtre sont puisés dans le même milieu, sont d'une nature identique, sont semblables en un mot ; ils possèdent une propriété d'assimilation plus ou moins développée, d'aimantation plus ou moins vigoureuse, qui nous permet, Esprits et incarnés, de nous mettre très promptement et très facilement en rapport. Enfin, ce qui appartient en propre aux médiums, ce qui est de l'essence même de leur individualité, c'est une affinité spéciale, et en même temps une force d'expansion particulière qui anéantissent en eux toute réfractibilité, et établissent entre eux et nous une sorte de courant, une espèce de fusion qui facilite nos communications. C'est, du reste, cette réfractibilité de la matière qui s'oppose au développement de la médianimité chez la plupart de ceux qui ne sont pas médiums. J'ajouterai que c'est à cette qualité réfractaire qu'il faut attribuer la particularité qui fait que certains individus, non médiums, transmettent et développent la médianimité, par leur simple contact, chez des médiums novices ou chez des médiums presque passifs, c'est-à-dire dépourvus de certaines qualités médianimiques.
Les hommes sont toujours disposés à tout exagérer ; les uns, je ne parle pas ici des matérialistes, refusent une âme aux animaux, et d'autres veulent leur en donner une, pour ainsi dire pareille à la nôtre. Pourquoi vouloir ainsi confondre le perfectible avec l'imperfectible ? Non, non, soyez-en bien convaincus, le feu qui anime les bêtes, le souffle qui les fait agir, mouvoir et parler en leur langage, n'a, quant à présent, aucune aptitude à se mêler, à s'unir, à se fondre avec le souffle divin, l'âme éthérée, l'Esprit en un mot, qui anime l'être essentiellement perfectible, l'homme, ce roi de la création. Or, n'est-ce pas ce qui fait la supériorité de l'espèce humaine sur les autres espèces terrestres que cette condition essentielle de perfectibilité ? Eh bien ! reconnaissez donc qu'on ne peut assimiler à l'homme, seul perfectible en lui-même et dans ses œuvres, aucun individu des autres races vivantes sur la terre.
Le chien, que son intelligence supérieure parmi les animaux, a rendu l'ami et le commensal de l'homme, est-il perfectible de son chef et de son initiative personnelle ? Nul n'oserait le soutenir ; car le chien ne fait pas progresser le chien ; et celui d'entre eux qui est le mieux dressé est toujours dressé par son maître. Depuis que le monde est monde, la loutre bâtit toujours sa hutte sur les eaux, d'après les mêmes proportions et suivant une règle invariable ; les rossignols et les hirondelles n'ont jamais construit leurs nids autrement que leurs pères ne l'avaient fait. Un nid de moineaux d'avant le déluge, comme un nid de moineaux de l'époque moderne, est toujours un nid de moineaux, édifié dans les mêmes conditions et avec le même système d'entrelacement de brins d'herbes et de débris, recueillis au printemps à l'époque des amours. Les abeilles et les fourmis, ces petites républiques ménagères, n'ont jamais varié dans leurs habitudes d'approvisionnement, dans leurs allures, dans leurs mœurs, dans leurs productions. Enfin l'araignée tisse toujours sa toile de la même manière.
D'un autre côté, si vous cherchez les cabanes de feuillage et les tentes des premiers âges de la terre, vous rencontrerez à leur place les palais et les châteaux de la civilisation moderne ; aux vêtements de peaux brutes, ont succédé les tissus d'or et de soie ; enfin, à chaque pas vous trouvez la preuve de cette marche incessante de l'humanité vers le progrès.
De ce progrès constant, invincible, irrécusable de l'espèce humaine, et de ce stationnement indéfini des autres espèces animées, concluez avec moi que s'il existe des principes communs à ce qui vit et se meut sur la terre : le souffle et la matière, il n'en est pas moins vrai que vous seuls, Esprits incarnés, êtes soumis à cette inévitable loi du progrès, qui vous pousse fatalement en avant et toujours en avant. Dieu a mis les animaux à côté de vous comme des auxiliaires pour vous nourrir, vous vêtir, vous seconder. Il leur a donné une certaine dose d'intelligence, parce que, pour vous aider, il leur fallait comprendre, et il a proportionné leur intelligence aux services qu'il sont appelés à rendre ; mais, dans sa sagesse, il n'a pas voulu qu'il fussent soumis à la même loi du progrès ; tels ils ont été créés, tels ils sont restés et resteront jusqu'à l'extinction de leurs races.
On a dit : les Esprits médianimisent et font mouvoir la matière inerte, des chaises, des tables, des pianos ; font mouvoir, oui ; mais médianimisent, non ! Car, encore une fois, sans médium aucun de ces phénomènes ne peut se produire. Qu'y a-t-il d'extraordinaire qu'à l'aide d'un ou de plusieurs médiums nous fassions mouvoir la matière inerte, passive, qui, justement en raison de sa passivité, de son inertie, est propre à subir les mouvements et les impulsions que nous désirons lui imprimer ? Pour cela nous avons besoin de médiums, c'est positif ; mais il n'est pas nécessaire que le médium soit présent ou conscient, car nous pouvons agir avec les éléments qu'il nous fournit, à son insu et hors de sa présence, surtout dans les faits de tangibilité et d'apports. Notre enveloppe fluidique, plus impondérable et plus subtile que le plus subtil et le plus impondérable de vos gaz, s'unissant, se mariant, se combinant avec l'enveloppe fluidique, mais animalisée du médium, et dont la propriété d'expansion et de pénétrabilité est insaisissable pour vos sens grossiers, et presque inexplicable pour vous, nous permet de mouvoir des meubles et même de les briser dans des pièces inhabitées.
Certainement les Esprits peuvent se rendre visibles et tangibles pour les animaux, et souvent telle frayeur subite que prennent ceux-ci, et qui ne vous semble pas motivée, est causée par la vue d'un ou de plusieurs de ces Esprits mal intentionnés pour les individus présents ou pour ceux à qui appartiennent ces animaux. Très souvent, vous apercevez des chevaux qui ne veulent ni avancer ni reculer, ou qui se cabrent devant un obstacle imaginaire ; eh bien ! tenez pour certain que l'obstacle imaginaire est souvent un Esprit ou un groupe d'Esprits qui se plaît à les empêcher d'avancer. Rappelez-vous l'ânesse de Balaam, qui voyant un ange devant elle, et redoutant son épée flamboyante, s'obstinait à ne pas bouger ; c'est qu'avant de se manifester visiblement à Balaam, l'ange avait voulu se rendre visible pour l'animal seul ; mais, je le répète, nous ne médianimisons directement ni les animaux ni la matière inerte ; il nous faut toujours le concours conscient ou inconscient d'un médium humain, parce qu'il nous faut l'union de fluides similaires, ce que nous ne trouvons ni dans les animaux, ni dans la matière brute.
M. Thiry, dit-il, a magnétisé son chien ; à quoi est-il arrivé ? Il l'a tué ; car ce malheureux animal est mort après être tombé dans une espèce d'atonie, de langueur, conséquence de sa magnétisation. En effet, en l'inondant d'un fluide puisé dans une essence supérieure à l'essence spéciale à sa nature, il l'a écrasé et a agi sur lui, quoique plus lentement, à la manière de la foudre. Donc, comme il n'y a nulle assimilation possible entre notre périsprit et l'enveloppe fluidique des animaux proprement dits, nous les écraserions instantanément en les médianimisant.
Ceci établi, je reconnais parfaitement que chez les animaux il existe des aptitudes diverses ; que certains sentiments, que certaines passions identiques aux passions et aux sentiments humains se développent en eux ; qu'ils sont sensibles et reconnaissants, vindicatifs et haineux, suivant que l'on agit bien ou mal avec eux. C'est que Dieu, qui ne fait rien d'incomplet, a donné aux animaux, compagnons ou serviteurs de l'homme, des qualités de sociabilité qui manquent entièrement aux animaux sauvages qui habitent les solitudes.
Pour me résumer : les faits médianimiques ne peuvent se manifester sans le concours conscient ou inconscient du médium ; et ce n'est que parmi les incarnés, Esprits comme nous, que nous pouvons rencontrer ceux qui peuvent nous servir de médiums. Quant à dresser des chiens, des oiseaux ou autres animaux pour faire tels ou tels exercices, c'est votre affaire et non la nôtre.
Éraste.
Remarque. A propos de la discussion qui eut lien dans la Société sur la médianimité des animaux, M. Allan Kardec dit qu'il a observé très attentivement les expériences qui ont été faites en ces derniers temps sur des oiseaux auxquels on attribuait la faculté médianimique, et il ajoute qu'il y a reconnu de la manière la moins contestable les procédés de la prestidigitation, c'est-à-dire des cartes forcées, mais employées avec assez d'adresse pour faire illusion sur des spectateurs qui se contentent de l'apparence sans scruter le fond. En effet, ces oiseaux font des choses que ni l'homme le plus intelligent, ni même le somnambule le plus lucide ne pourraient faire, d'où il faudrait conclure qu'ils possèdent des facultés intellectuelles supérieures à l'homme, ce qui serait contraire aux lois de la nature. Ce qu'il faut le plus admirer dans ces expériences, c'est l'art, la patience qu'il a fallu déployer pour dresser ces animaux, les rendre dociles et attentifs ; pour obtenir ces résultats, il a certainement fallu avoir affaire à des natures flexibles, mais ce ne peut être en définitive que des animaux dressés, chez qui il y a plus d'habitude que de combinaisons ; et la preuve en est, c'est que si on cesse de les exercer pendant quelque temps, ils perdent bientôt ce qu'ils ont appris. Le charme de ces expériences, comme celui de tous les tours de prestidigitation, est dans le secret des procédés ; une fois le procédé connu, elles perdent tout leur attrait ; c'est ce qui est arrivé quand les saltimbanques ont voulu imiter la lucidité somnambulique par le prétendu phénomène de ce qu'ils appelaient la double vue. Il ne pouvait y avoir d'illusion pour quiconque connaissait les conditions normales du somnambulisme ; il en est de même de la prétendue médianimité des oiseaux dont tout observateur expérimenté peut facilement se rendre compte.
Peuples, faites silence ! (Envoi de M. Sabô, de Bordeaux, médium madame Cazemajoux.)
I Où courent ces enfants revêtus de robes blanches ? la joie illumine leurs cœurs ; leur essaim folâtre va s'ébattre dans les vertes prairies où ils feront une ample moisson de fleurs et poursuivront l'insecte brillant qui se nourrit dans leurs calices. Insouciants et heureux, ils ne voient pas plus loin que l'horizon bleu qui les entoure ; leur chute sera terrible, si vous ne vous hâtez de disposer leurs cœurs aux enseignements spirites ;
Car les Esprits du Seigneur ont passé à travers les nues et viennent vous prêcher ; prêtez l'oreille à leurs voix amies ; écoutez attentivement ; peuples, faites silence !
II Ils sont devenus grands et forts ; la mâle beauté des uns, la grâce et l'abandon des autres font revivre dans le cœur des pères les doux souvenirs d'une époque déjà éloignée d'eux, mais le sourire qui allait s'épanouir sur leurs lèvres flétries disparaît pour faire place aux sombres soucis. C'est qu'eux aussi, ils ont bu à longs traits dans la coupe enchantée des illusions de la jeunesse, et son poison subtil a appauvri leur sang, énervé leurs forces, vieilli leurs visages, dégarni leurs fronts, et ils voudraient empêcher leurs fils de goûter à cette coupe empoisonnée. Frères ! le Spiritisme sera l'antidote qui doit préserver la nouvelle génération de ses mortels ravages ;
Car les Esprits du Seigneur ont passé à travers les nues et viennent vous prêcher ; prêtez l'oreille à leurs voix amies ; écoutez attentivement ; peuples, faites silence !
III Ils ont atteint l'âge de la virilité ; ils sont devenus hommes ; ils sont sérieux et graves, mais ils ne sont pas heureux ; leur cœur est blasé et n'a qu'une fibre sensible : celle de l'ambition. Ils emploient tout ce qu'ils ont de force et d'énergie à acquérir des biens terrestres. Pour eux, pas de bonheur sans les dignités, les honneurs, la fortune. Insensés ! D'un instant à l'autre, l'ange de la délivrance va vous frapper ; vous serez forcés d'abandonner toutes ces chimères ; vous êtes des proscrits que Dieu peut rappeler d'un instant à l'autre dans la mère patrie. Ne bâtissez ni palais ni monuments ; une tente, des vêtements et du pain, voilà le nécessaire. Contentez-vous de cela, et avec votre superflu donnez à vos frères qui en manquent : l'abri, le vêtement et le pain. Le Spiritisme vient vous dire que les véritables trésors que vous devez acquérir sont l'amour de Dieu et du prochain ; ils vous feront riches pour l'éternité ;
Car les Esprits du Seigneur ont passé à travers les nues et viennent vous prêcher ; prêtez l'oreille à leurs voix amies ; écoutez attentivement ; peuples, faites silence !
IV Ils ont leurs fronts penchés sur le bord du sépulcre ; ils ont peur et voudraient relever la tête, mais le temps a voûté leurs épaules, raidi leurs nerfs et leurs muscles, et ils sont impuissants à regarder en haut. Ah ! quelles angoisses viennent les assaillir ! Ils repassent dans le secret de leur âme leur vie inutile et souvent criminelle ; le remords les ronge comme un vautour affamé ; c'est qu'ils ont souvent, dans le cours de cette existence écoulée dans l'indifférence, nié leur Dieu, et il leur apparaît au bord de la tombe, vengeur inexorable. Ne craignez pas, Frères, et priez. Si dans sa justice, Dieu vous châtie, il fera grâce à votre repentir, car le Spiritisme vient vous dire que l'éternité des peines n'existe pas, et que vous renaissez pour vous purifier et expier. Aussi, vous qui êtes fatigués de votre exil sur la terre, faites tous vos efforts pour vous améliorer afin de n'y plus revenir ;
Car les Esprits du Seigneur ont passé à travers les nues et viennent vous prêcher ; prêtez l'oreille à leurs voix amies ; écoutez attentivement ; peuples, faites silence !
Byron.
Jean-Jacques Rousseau (Méd. Madame Costel.)
Nota. Le médium était occupé de choses très étrangères au Spiritisme ; il se disposait à écrire pour des affaires personnelles, lorsqu'une force invisible le contraignit d'écrire ce qui suit, malgré son désir de poursuivre le travail commencé. C'est ce qui explique le début de la communication :
« Me voici, quoique tu ne m'appelles pas. Je viens te parler de choses très étrangères à tes préoccupations. Je suis l'Esprit de Jean-Jacques Rousseau. J'attendais depuis longtemps l'occasion de me communiquer à toi. Ecoute donc.
« Je pense que le Spiritisme est une étude toute philosophique des causes secrètes des mouvements intérieurs de l'âme peu ou point définis jusqu'ici. Il explique, plus encore qu'il ne découvre, des horizons nouveaux. La réincarnation et les épreuves subies avant d'arriver au but suprême, ne sont pas des révélations, mais une confirmation importante. Je suis frappé des vérités que ce moyen met en lumière. Je dis moyen avec intention, car, à mon sens, le Spiritisme est un levier qui écarte les barrières de l'aveuglement. La préoccupation des questions morales est tout entière à créer ; on discute la politique qui remue les intérêts généraux ; on discute les intérêts privés ; on se passionne pour l'attaque ou la défense des personnalités ; les systèmes ont leurs partisans et leurs détracteurs ; mais les vérités morales, celles qui sont le pain de l'âme, le pain de vie, sont laissées dans la poussière accumulée par les siècles. Tous les perfectionnements sont utiles aux yeux de la foule, sauf celui de l'âme ; son éducation, son élévation sont des chimères bonnes tout au plus pour occuper les loisirs des prêtres, des poètes, des femmes, soit à l'état de mode, soit à l'état d'enseignement.
« Si le Spiritisme ressuscite le Spiritualisme, il rendra à la société l'élan qui donne aux uns la dignité intérieure, aux autres la résignation, à tous le besoin de s'élever vers l'Être suprême oublié et méconnu par ses ingrates créatures.
« J.-J. Rousseau. »
La Controverse (Envoi de M. Sabô, de Bordeaux.)
O Dieu ! mon maître, mon père et mon créateur, daignez donner encore à votre serviteur un peu de cette éloquence humaine qui portait la conviction dans le cœur des Frères qui venaient, autour de la chaire sacrée, s'instruire des vérités que vous leur avez enseignées.
Dieu, en vous envoyant ses Esprits pour vous enseigner vos véritables devoirs envers lui et envers vos frères, veut surtout que la charité soit votre mobile dans toutes vos actions, et vos frères qui veulent faire renaître ces jours de deuil sont dans la voie de l'orgueil. Ce temps est loin de vous, et Dieu soit à jamais béni d'avoir permis que les hommes cessassent pour toujours ces disputes religieuses qui n'ont jamais produit aucun bien et qui ont causé tant de mal. Pourquoi vouloir discuter les textes évangéliques que vous avez déjà commentés de tant de manières ? Ces divers commentaires ont eu lieu alors que vous n'aviez pas le Spiritisme pour vous éclairer, et il vous dit : La morale évangélique est la meilleure, et suivez-la ; mais si, dans le fond de votre conscience, une voix vous crie : Pour moi il y a tel ou tel point obscur, et je ne puis me permettre de penser différemment que mes autres frères ! Héloïm ! mon frère, laissez de côté ce ni est trouble pour vous ; aimez Dieu et la charité, et vous serez dans la bonne voie. A quoi a servi le fruit de mes longues veilles quand je vivais dans votre monde ? à rien. Beaucoup n'ont pas jeté les yeux sur mes écrits qui n'étaient pas dictés par la charité et qui ont attiré des persécutions à mes frères. La controverse est toujours animée d'un sentiment d'intolérance qui peut dégénérer jusqu'à l'offense, et l'entêtement que chacun met à soutenir ses prétentions éloigne l'époque où la grande famille humaine, reconnaissant ses erreurs passées, respectera toutes les croyances et n'aiguisera pas elle-même le poignard qui avait tranché ces liens fraternels. Et pour vous donner un exemple de ce que je vous dis, ouvrez l'Évangile, et vous y trouverez ces paroles : « Je suis la vérité et la vie ; celui-là seul qui croira en moi vivra. » Et beaucoup d'entre vous condamnent ceux qui ne suivent pas la religion qui possède les enseignements du Verbe incarné ; pourtant, beaucoup sont assis à la droite du Seigneur, parce que, dans la droiture de leurs coeurs, ils l'ont adoré, aimé ; qu'ils ont respecté les croyances de leurs frères et qu'ils ont crié vers le Seigneur quand ils ont vu les peuples se déchirer entre eux dans leurs luttes de religion, et qu'ils n'étaient pas aptes à trouver le véritable sens des paroles du Christ, et qu'ils n'étaient que les insruments aveugles de leurs prêtres ou de leurs ministres.
Mon Dieu, moi qui vivais dans ces temps où les cœurs étaient gros de tempêtes pour les frères d'une croyance opposée, si j'avais été plus tolérant, si je n'avais pas condamné dans mes écrits leur manière d'interpréter l'Évangile, ils seraient aujourd'hui moins irrités contre leurs frères catholiques, et tous auraient fait un pas plus grand vers la fraternité universelle ; mais les Protestants, les Juifs, toutes les religions un peu marquantes, ont leurs savants et leurs docteurs, et quand le Spiritisme, plus répandu, sera étudié de bonne foi par ces hommes instruits, ils viendront, comme l'ont fait les Catholiques, donner la lumière à leurs frères et calmer leurs scrupules religieux. Laissez donc Dieu poursuivre l'œuvre de la réforme morale qui doit vous élever vers lui, tous au même degré, et ne soyez pas rebelles aux enseignements des Esprits qu'ils vous envoie.
Bossuet.
Le Paupérisme (Envoi de M. Sabô, de Bordeaux.)
C'est en vain que les philanthropes de votre terre rêvent des choses qu'ils ne verront jamais se réaliser. Rappelez-vous cette parole du Christ : « Vous aurez toujours des pauvres parmi vous, » et vous savez que ses paroles sont des paroles de vérité. N'est-ce pas, mon ami, qu'à présent que vous connaissez le Spiritisme, vous trouvez juste et équitable cette inégalité des conditions qui vous soulevait le cœur, gros de murmures contre ce Dieu qui n'avait pas fait tous les hommes également riches et heureux ? Eh bien ! maintenant que vous pensez que Dieu fait bien tout ce qu'il fait, et que vous savez que la pauvreté est un châtiment ou une épreuve, cherchez à la soulager, mais ne venez pas, par des utopies, faire rêver au malheureux une égalité impossible. Certes que, par une sage organisation sociale, on peut alléger bien des souffrances, et c'est à quoi il faut viser ; mais prétendre les faire toutes disparaître de dessus la surface de la terre est une idée chimérique. La terre étant un lieu d'expiation, il y aura toujours des pauvres qui expient dans cette épreuve l'abus qu'ils ont fait des biens dont Dieu les avait fait les dispensateurs et qui n'ont jamais connu la douceur de faire du bien à leurs frères ; qui ont thésaurisé pièce à pièce pour amasser des richesses inutiles à eux-mêmes et aux autres ; qui se sont enrichis des dépouilles de la veuve et de l'orphelin. Oh ! ceux-là sont bien coupables, et leur égoïsme aura un terrible retour !
Gardez-vous cependant de voir dans tous les pauvres des coupables en punition ; si la pauvreté est pour quelques-uns une expiation sévère, pour d'autres c'est une épreuve qui doit leur ouvrir plus promptement le sanctuaire des élus. Oui, il y aura toujours des pauvres et des riches, pour que les uns aient le mérite de la résignation, et les autres celui de la charité et du dévouement. Que vous soyez riches ou pauvres, vous êtes sur un terrain glissant qui peut vous précipiter dans l'abîme, et sur la pente duquel vos vertus seules peuvent vous retenir.
Quand je dis qu'il y aura toujours des pauvres sur la terre, je veux dire tant qu'il y aura des vices qui en feront un lieu d'expiation pour les Esprits pervers que Dieu y envoie s'incarner pour leur propre châtiment et celui des vivants. Méritez par vos vertus, que Dieu ne vous envoie que de bons Esprits, et d'un enfer vous ferez un paradis terrestre.
Adolphe, évêque d'Alger.
La Concorde (Envoi de M. Rodolphe, de Mulhouse.)
Soyez unis, mes amis, c'est l'union qui fait la force. Proscrivez de vos réunions tout esprit de discorde, tout esprit de jalousie. N'enviez pas les communications que reçoit tel ou tel médium, chacun en reçoit suivant la disposition de son esprit et la perfection de ses organes.
N'oubliez jamais que vous êtes frères, et cette fraternité n'est pas illusoire : c'est une fraternité réelle ; car celui qui a été votre frère dans une autre existence peut se trouver parmi vous, appartenant à une autre famille.
Soyez donc unis d'esprit et de cœur ; ayez la même communion de pensées. Soyez dignes de vous-mêmes, de la doctrine que vous professez et des enseignements que vous êtes appelés à répandre.
Soyez donc conciliants dans vos opinions ; n'en ayez pas d'absolues ; cherchez à vous éclairer les uns par les autres. Soyez à la hauteur de votre apostolat, et donnez au monde l'exemple de la bonne harmonie.
Soyez l'exemple vivant de la fraternité humaine, et montrez à quoi peuvent arriver des hommes sincèrement dévoués à la propagation de la morale.
N'ayant qu'un seul but, vous ne devez avoir qu'une même pensée, celle de mettre en pratique ce que vous enseignez. Que votre devise soit donc : Union et concorde, Paix et fraternité !
Mardochée
L'aurore des nouveaux jours (Société spirite de Paris. Médium Madame Costel.)
Me voici, moi que vous n'évoquez pas, mais qui suis désireuse d'être utile à mon tour à une Société dont le but est aussi sérieux que l'est le vôtre. Je vous parlerai de politique. Ne vous effrayez pas : je sais dans quelles limites je dois me renfermer.
La situation actuelle de l'Europe offre l'aspect le plus saisissant pour l'observateur ; à aucune époque, je n'en excepte pas même la fin du dernier siècle qui a opéré une si large trouée dans les préjugés et les abus qui comprimaient l'esprit humain ; à aucune époque, dis-je, le mouvement intellectuel ne s'est fait sentir plus hardi, plus franc. Je dis franc, car l'esprit européen marche dans le vrai. La liberté n'est plus un fantôme sanglant, mais la belle et grande déesse de la prospérité publique. En Allemagne même, dans cette Allemagne que j'ai décrite avec tant d'amour, le souffle ardent de l'époque abat les dernières forteresses des préjugés. Soyez heureux, vous qui vivez dans un tel moment ; mais plus heureux encore seront vos descendants ; car l'heure approche, l'heure annoncée par le Précurseur ; vous voyez blanchir l'horizon, mais, comme jadis les Hébreux, vous resterez au seuil de la Terre Promise, et vous ne verrez pas se lever le soleil radieux des nouveaux jours.
Staël
Allan Kardec
[1] On voit que, lorsqu'il s'agit d'exprimer une idée nouvelle pour laquelle la langue manque de termes, les Esprits savent parfaitement créer des néologismes. Ces mots :
électromédianimique,
périspritique, ne sont pas de nous. Ceux qui nous ont critiqué d'avoir créé les mots
spirite,
spiritisme,
périsprit, qui n'avaient pas leurs analogues, pourront aussi faire le même procès aux Esprits.