Métempsycose
« Connaissez-vous la cause des bruits qui nous arrivent ? disait madame
Des Genêts. Est-ce quelque nouvelle scène de tigres déchaînés que nous
préparent ces messieurs ?
– Rassurez-vous, chère amie, tout est
en sûreté : nos vivants et nos morts. Entendez la ravissante mélodie du
rossignol qui chante dans ce saule ! C'est peut-être l'âme de l'un de
nos martyrs qui plane autour de nous sous cette forme aimable. Les morts
ont de ces privilèges ; et je me persuade volontiers qu'ils reviennent
souvent ainsi auprès de ceux qu'ils ont aimés.
– Oh ! si vous disiez vrai ! exclama vivement madame Des Genêts.
– J'y crois sincèrement, fit la jeune duchesse. Il est si bon de
croire aux choses consolantes ! Du reste, mon père, qui est très savant,
comme vous ne l'ignorez pas, m'a assuré que cette croyance avait été
répandue anciennement par de grands philosophes. Lesage, lui, y croit
aussi. »
Ce passage est tiré d'un roman-feuilleton intitulé :
Le Cachot de la Tour des pins, par Paulin Capmal, publié par la
Liberté du 4 novembre 1867. Ici, l'idée n'est point empruntée à la doctrine
spirite, puisque celle-ci a de tout temps enseigné et prouvé que l'âme
humaine ne peut renaître dans un corps animal, ce qui n'empêche pas
certains critiques, qui n'ont pas lu le premier mot du Spiritisme, de
répéter qu'il professe la métempsycose ; mais c'est toujours la pensée
de l'âme individuelle survivant au corps, revenant sous une forme
tangible auprès de ceux qu'elle a aimés. Si l'idée n'est pas spirite,
elle est au moins spiritualiste, et mieux vaudrait encore croire à la
métempsycose que de croire au néant. Cette croyance, au moins, n'est pas
désespérante comme le matérialisme ; elle n'a rien d'immoral, au
contraire ; elle a conduit tous les peuples qui l'ont professée à
traiter les animaux avec douceur et bienfaisance. Cette exclamation : Il
est si bon de croire aux choses consolantes, est le grand secret du
succès du Spiritisme.