L’ÉVANGILE SELON LE SPIRITISME

Allan Kardec

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CHAPITRE XVIII
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BEAUCOUP D'APPELES ET PEU D'ELUS


Parabole du festin de noces. - La porte étroite. - Ceux qui disent : Seigneur ! Seigneur ! n'entreront pas tous dans le royaume des cieux. - On demandera beaucoup à celui qui a beaucoup reçu. - Instructions des Esprits : On donnera à celui qui a. - On reconnaît le chrétien à ses oeuvres.

Parabole du festin de noces

1. Jésus parlant encore en parabole, leur dit :

Le royaume des cieux est semblable à un roi, qui voulant faire les noces de son fils, - envoya ses serviteurs pour appeler aux noces ceux qui y étaient conviés ; mais ils refusèrent d'y venir. - Il envoya encore d'autres serviteurs avec ordre de dire de sa part aux conviés : J'ai préparé mon dîner ; j'ai fait tuer mes boeufs et tout ce que j'avais fait engraisser ; tout est prêt, venez aux noces. - Mais eux, ne s'en mettant point en peine, s'en allèrent, l'un à sa maison des champs, et l'autre à son négoce. - Les autres se saisirent de ses serviteurs, et les tuèrent après leur avoir fait plusieurs outrages. - Le roi l'ayant appris en fut ému de colère, et ayant envoyé ses armées, il extermina ces meurtriers et brûla leur ville.

Alors il dit à ses serviteurs : Le festin de noces est tout prêt ; mais ceux qui y avaient été appelés n'en ont pas été dignes. Allez donc dans les carrefours, et appelez aux noces tous ceux que vous trouverez. - Ses serviteurs s'en allant alors par les rues, assemblèrent tous ceux qu'ils trouvèrent, bons et mauvais ; et la salle de noces fut remplie de personnes qui se mirent à table.

Le roi entra ensuite pour voir ceux qui étaient à table, et y ayant aperçu un homme qui n'était pas revêtu de la robe nuptiale, - il lui dit : Mon ami, comment êtes-vous entré ici sans avoir la robe nuptiale ? Et cet homme resta muet. - Alors le roi dit à ses gens : Liez-lui les mains et les pieds, et jetez-le dans les ténèbres extérieures : c'est là qu'il y aura des pleurs et des grincements de dents ; - car il y en a beaucoup d'appelés et peu d'élus. (Saint Matthieu, ch. XXII, v. de 1 à 14.)

2. L'incrédule sourit à cette parabole qui lui semble d'une puérile naïveté, car il ne comprend pas qu'on puisse faire tant de difficultés pour assister à un festin, et encore moins que des invités poussent la résistance jusqu'à massacrer les envoyés du maître de la maison. «Les paraboles, dit-il, sont sans doute des figures, mais encore faut-il qu'elles ne sortent pas des limites du vraisemblable.»

On peut en dire autant de toutes les allégories, des fables les plus ingénieuses, si on ne les dépouille pas de leur enveloppe pour en chercher le sens caché. Jésus puisait les siennes dans les usages les plus vulgaires de la vie, et les adaptait aux moeurs et au caractère du peuple auquel il parlait ; la plupart ont pour but de faire pénétrer dans les masses l'idée de la vie spirituelle ; le sens n'en paraît souvent inintelligible que parce qu'on ne part pas de ce point de vue.

Dans cette parabole, Jésus compare le royaume des cieux, où tout est joie et bonheur, à un festin. Par les premiers conviés, il fait allusion aux Hébreux que Dieu avait appelés les premiers à la connaissance de sa loi. Les envoyés du maître sont les prophètes qui venaient les exhorter à suivre la route de la vraie félicité ; mais leurs paroles étaient peu écoutées ; leurs avertissements étaient méprisés ; plusieurs même furent massacrés comme les serviteurs de la parabole. Les invités qui s'excusent sur les soins à donner à leurs champs et à leur négoce, sont l'emblème des gens du monde qui, absorbés par les choses terrestres, sont indifférents sur les choses célestes.

C'était une croyance, chez les Juifs d'alors, que leur nation devait acquérir la suprématie sur toutes les autres. Dieu n'avait-il pas, en effet, promis à Abraham que sa postérité couvrirait toute la terre ? Mais toujours, prenant la forme pour le fond, ils croyaient à une domination effective et matérielle.

Avant la venue du Christ, à l'exception des Hébreux, tous les peuples étaient idolâtres et polythéistes. Si quelques hommes supérieurs au vulgaire conçurent l'idée de l'unité divine, cette idée resta à l'état de système personnel, mais nulle part elle ne fut acceptée comme vérité fondamentale, si ce n'est par quelques initiés qui cachaient leurs connaissances sous un voile mystérieux impénétrable aux masses. Les Hébreux furent les premiers qui pratiquèrent publiquement le monothéisme ; c'est à eux que Dieu transmit sa loi, d'abord par Moïse, puis par Jésus ; c'est de ce petit foyer qu'est partie la lumière qui devait se répandre sur le monde entier, triompher du paganisme, et donner à Abraham une postérité spirituelle «aussi nombreuse que les étoiles du firmament.» Mais les Juifs, tout en repoussant l'idolâtrie, avaient négligé la loi morale pour s'attacher à la pratique plus facile des formes extérieures. Le mal était à son comble ; la nation asservie était déchirée par les factions, divisée par les sectes ; l'incrédulité même avait pénétré jusque dans le sanctuaire. C'est alors que parut Jésus, envoyé pour les rappeler à l'observation de la loi, et leur ouvrir les horizons nouveaux de la vie future ; conviés des premiers au grand banquet de la foi universelle, ils repoussèrent la parole du céleste Messie, et le firent périr ; c'est ainsi qu'ils perdirent le fruit qu'ils eussent recueilli de leur initiative.

Il serait injuste, toutefois, d'accuser le peuple entier de cet état de choses ; la responsabilité en incombe principalement aux Pharisiens et aux Sadducéens qui ont perdu la nation, par l'orgueil et le fanatisme des uns, et par l'incrédulité des autres. Ce sont eux surtout que Jésus assimile aux invités qui refusent de se rendre au repas de noces. Puis il ajoute : «Le Maître voyant cela, fit convier tous ceux que l'on trouva dans les carrefours, bons et mauvais ;» il entendait par là que la parole allait être prêchée à tous les autres peuples, païens et idolâtres, et que ceux-ci l'acceptant seraient admis au festin à la place des premiers conviés.

Mais il ne suffit pas d'être invité ; il ne suffit pas de porter le nom de chrétien, ni de s'asseoir à la table pour prendre part au céleste banquet ; il faut avant tout, et de condition expresse, être revêtu de la robe nuptiale, c'est-à-dire avoir la pureté du coeur, et pratiquer la loi selon l'esprit ; or cette loi est tout entière dans ces mots : Hors la charité point de salut. Mais parmi tous ceux qui entendent la parole divine, combien peu en est-il qui la gardent et la mettent à profit ! Combien peu se rendent dignes d'entrer dans le royaume des cieux ! C'est pourquoi Jésus dit : Il y aura beaucoup d'appelés et peu d'élus.


La porte étroite


3. Entrez par la porte étroite, parce que la porte de la perdition est large, et le chemin qui y mène est spacieux, et il y en a beaucoup qui y entrent. - Que la porte de la vie est petite ! que la voie qui y mène est étroite ! et qu'il y en a peu qui la trouvent ! (Saint Matthieu, ch. VII, v. 13, 14.)

4. Quelqu'un lui ayant fait cette demande : Seigneur, y en aura-t-il peu de sauvés ? Il leur répondit : - Faites effort pour entrer par la porte étroite, car je vous assure que plusieurs chercheront à y entrer, et ne le pourront pas. - Et quand le père de famille sera entré et aura fermé la porte, et que vous, étant dehors, vous commencerez à heurter, en disant : Seigneur, ouvrez-nous ; il vous répondra : Je ne sais d'où vous êtes. - Alors vous commencerez à dire : Nous avons mangé et bu en votre présence, et vous avez enseigné dans nos places publiques. - Et il vous répondra : Je ne sais d'où vous êtes ; retirez-vous de moi, vous tous qui commettez l'iniquité.

Ce sera alors qu'il y aura des pleurs et des grincements de dents, quand vous verrez qu'Abraham, Isaac, Jacob et tous les prophètes seront dans le royaume de Dieu, et que vous autres vous serez chassés dehors. - Il en viendra d'Orient et d'Occident, du Septentrion et du Midi, qui auront place au festin dans le royaume de Dieu. - Alors ceux qui sont les derniers seront les premiers, et ceux qui sont les premiers seront les derniers. (Saint Luc, ch. XIII, v. de 23 à 30.)

5. La porte de la perdition est large, parce que les mauvaises passions sont nombreuses, et que la route du mal est fréquentée par le plus grand nombre. Celle du salut est étroite, parce que l'homme qui veut la franchir doit faire de grands efforts sur lui-même pour vaincre ses mauvaises tendances, et que peu s'y résignent ; c'est le complément de la maxime : Il y a beaucoup d'appelés et peu d'élus.

Tel est l'état actuel de l'humanité terrestre, parce que la terre étant un monde d'expiation le mal y domine ; quand elle sera transformée, la route du bien sera la plus fréquentée. Ces paroles doivent donc s'entendre dans le sens relatif et non dans le sens absolu. Si tel devait être l'état normal de l'humanité, Dieu aurait volontairement voué à la perdition l'immense majorité de ses créatures ; supposition inadmissible, dès lors qu'on reconnaît que Dieu est toute justice et toute bonté.

Mais de quels méfaits cette humanité aurait-elle pu se rendre coupable pour mériter un sort si triste, dans son présent et dans son avenir, si elle était toute reléguée sur la terre, et si l'âme n'avait pas eu d'autres existences ? Pourquoi tant d'entraves semées sur sa route ? Pourquoi cette porte si étroite qu'il est donné au plus petit nombre de franchir, si le sort de l'âme est fixé pour jamais après la mort ? C'est ainsi qu'avec l'unité d'existence on est incessamment en contradiction avec soi-même et avec la justice de Dieu. Avec l'antériorité de l'âme et la pluralité des mondes, l'horizon s'élargit ; la lumière se fait sur les points les plus obscurs de la foi ; le présent et l'avenir sont solidaires du passé ; alors seulement on peut comprendre toute la profondeur, toute la vérité et toute la sagesse des maximes du Christ.


Ceux qui disent : Seigneur ! Seigneur !


6. Ceux qui me disent : Seigneur ! Seigneur ! n'entreront pas tous dans le royaume des cieux ; mais celui-là seulement entrera qui fait la volonté de mon Père qui est dans les cieux. - Plusieurs me diront ce jour-là : Seigneur ! Seigneur ! n'avons-nous pas prophétisé en votre nom ? n'avons-nous pas chassé les démons en votre nom, et n'avons-nous pas fait plusieurs miracles en votre nom ? - Et alors je leur dirai hautement : Retirez-vous de moi, vous qui faites des oeuvres d'iniquité. (Saint Matthieu, ch. VII, v. 21, 22, 23.)

7. Quiconque donc entend ces paroles que je dis et les pratique, sera comparé à un homme sage qui a bâti sa maison sur la pierre ; - et lorsque la pluie est tombée, que les fleuves se sont débordés, que les vents ont soufflé et sont venus fondre sur cette maison, elle n'est point tombée, parce qu'elle était fondée sur la pierre. - Mais quiconque entend ces paroles que je dis et ne les pratique point, sera semblable à un homme insensé qui a bâti sa maison sur le sable ; et lorsque la pluie est tombée, que les fleuves se sont débordés, que les vents ont soufflé et sont venus fondre sur cette maison, elle a été renversée, et sa ruine a été grande. (Saint Matthieu, ch. VII, v. de 24 à 27. - Saint Luc, ch. VI, v. de 46 à 49.)

8. Celui donc qui violera un de ces moindres commandements, et qui apprendra aux hommes à les violer, sera regardé dans le royaume des cieux comme le dernier ; mais celui qui fera et enseignera sera grand dans le royaume des cieux. (Saint Matthieu, ch. V, v. 19.)

9. Tous ceux qui confessent la mission de Jésus disent : Seigneur ! Seigneur ! Mais à quoi sert de l'appeler Maître ou Seigneur si l'on ne suit pas ses préceptes ? Sont-ils chrétiens ceux qui l'honorent par des actes extérieurs de dévotion et sacrifient en même temps à l'orgueil, à l'égoïsme, à la cupidité et à toutes leurs passions ? Sont-ils ses disciples ceux qui passent des journées en prières et n'en sont ni meilleurs, ni plus charitables, ni plus indulgents pour leurs semblables ? Non, car, ainsi que les Pharisiens, ils ont la prière sur les lèvres et non dans le coeur. Avec la forme, ils peuvent en imposer aux hommes, mais non à Dieu. C'est en vain qu'ils diront à Jésus : «Seigneur, nous avons prophétisé, c'est-à-dire enseigné en votre nom ; nous avons chassé les démons en votre nom ; nous avons bu et mangé avec vous ;» il leur répondra : «Je ne sais qui vous êtes ; retirez-vous de moi, vous qui commettez des iniquités, vous qui démentez vos paroles par vos actions, qui calomniez votre prochain, qui spoliez les veuves et commettez l'adultère ; retirez-vous de moi, vous dont le coeur distille la haine et le fiel, vous qui répandez le sang de vos frères en mon nom, qui faites couler des larmes au lieu de les sécher. Pour vous il y aura des pleurs et des grincements de dents, car le royaume de Dieu est pour ceux qui sont doux, humbles et charitables. N'espérez pas fléchir la justice du Seigneur par la multiplicité de vos paroles et de vos génuflexions ; la seule voie qui vous est ouverte pour trouver grâce devant lui, c'est la pratique sincère de la loi d'amour et de charité.»

Les paroles de Jésus sont éternelles, parce qu'elles sont la vérité. Elles sont non seulement la sauvegarde de la vie céleste, mais le gage de la paix, de la tranquillité et de la stabilité dans les choses de la vie terrestre ; c'est pourquoi toutes les institutions humaines, politiques, sociales et religieuses qui s'appuieront sur ces paroles seront stables comme la maison bâtie sur la pierre ; les hommes les conserveront parce qu'ils y trouveront leur bonheur ; mais celles qui en seront la violation, seront comme la maison bâtie sur le sable : le vent des révolutions et le fleuve du progrès les emporteront.


On demandera beaucoup à celui qui a beaucoup reçu


10. Le serviteur qui aura su la volonté de son maître, et qui néanmoins ne se sera pas tenu prêt et n'aura pas fait ce qu'il désirait de lui, sera battu rudement ; - mais celui qui n'aura pas su sa volonté, et qui aura fait des choses dignes de châtiment, sera moins battu. On demandera beaucoup à celui à qui on aura beaucoup donné, et on fera rendre un plus grand compte à celui à qui on aura confié plus de choses. (Saint Luc, ch. XII, v. 47, 48.)

11. Je suis venu dans ce monde pour exercer un jugement, afin que ceux qui ne voient point voient, et que ceux qui voient deviennent aveugles. - Quelques pharisiens qui étaient avec lui entendirent ces paroles et lui dirent : Sommes-nous donc aussi aveugles ? - Jésus leur répondit : Si vous étiez aveugles, vous n'auriez point de péché ; mais maintenant vous dites que vous voyez, et c'est pour cela que votre péché demeure en vous. (Saint Jean, ch. IX, v. 39, 40, 41.)

12. Ces maximes trouvent surtout leur application dans l'enseignement des Esprits. Quiconque connaît les préceptes du Christ est coupable assurément de ne pas les pratiquer ; mais outre que l'Evangile qui les contient n'est répandu que dans les sectes chrétiennes, parmi celles-ci, combien est-il de gens qui ne le lisent pas, et parmi ceux qui le lisent, combien en est-il qui ne le comprennent pas ! Il en résulte que les paroles même de Jésus sont perdues pour le plus grand nombre.

L'enseignement des Esprits qui reproduit ces maximes sous différentes formes, qui les développe et les commente pour les mettre à la portée de tous, a cela de particulier qu'il n'est point circonscrit, et que chacun, lettré ou illettré, croyant ou incrédule, chrétien ou non, peut le recevoir, puisque les Esprits se communiquent partout ; nul de ceux qui le reçoivent, directement ou par entremise, ne peut prétexter ignorance ; il ne peut s'excuser ni sur son défaut d'instruction, ni sur l'obscurité du sens allégorique. Celui donc qui ne les met pas à profit pour son amélioration, qui les admire comme choses intéressantes et curieuses sans que son coeur en soit touché, qui n'en est ni moins vain, ni moins orgueilleux, ni moins égoïste, ni moins attaché aux biens matériels, ni meilleur pour son prochain, est d'autant plus coupable qu'il a plus de moyens de connaître la vérité.

Les médiums qui obtiennent de bonnes communications sont encore plus répréhensibles de persister dans le mal, parce que souvent ils écrivent leur propre condamnation, et que, s'ils n'étaient aveuglés par l'orgueil, ils reconnaîtraient que c'est à eux que les Esprits s'adressent. Mais, au lieu de prendre pour eux les leçons qu'ils écrivent, ou qu'ils voient écrire, leur unique pensée est de les appliquer aux autres, réalisant ainsi cette parole de Jésus : «Vous voyez une paille dans l'oeil de votre voisin, et vous ne voyez pas la poutre qui est dans le vôtre.» (Ch. X, nº 9.)

Par cette autre parole : «Si vous étiez aveugles vous n'auriez point péché», Jésus entend que la culpabilité est en raison des lumières que l'on possède ; or, les Pharisiens, qui avaient la prétention d'être, et qui étaient, en effet, la partie la plus éclairée de la nation, étaient plus répréhensibles aux yeux de Dieu que le peuple ignorant. Il en est de même aujourd'hui.

Aux spirites, il sera donc beaucoup demandé, parce qu'ils ont beaucoup reçu, mais aussi à ceux qui auront profité il sera beaucoup donné.

La première pensée de tout spirite sincère doit être de chercher, dans les conseils donnés par les Esprits, s'il n'y a pas quelque chose qui puisse le concerner.

Le spiritisme vient multiplier le nombre des appelés ; par la foi qu'il donne, il multipliera aussi le nombre des élus.


INSTRUCTIONS DES ESPRITS

On donnera à celui qui a


13. Ses disciples s'approchant, lui dirent : Pourquoi leur parlez-vous en paraboles ? - Et leur répondant, il leur dit : C'est parce que pour vous autres, il vous a été donné de connaître les mystères du royaume des cieux, mais pour eux, il ne leur a pas été donné. - Car quiconque a déjà, on lui donnera encore, et il sera dans l'abondance ; mais pour celui qui n'a point, on lui ôtera même ce qu'il a. - C'est pourquoi je leur parle en paraboles ; parce qu'en voyant ils ne voient point, et qu'en écoutant ils n'entendent ni ne comprennent point. - Et la prophétie d'Isaïe s'accomplit en eux, lorsqu'il dit : Vous écouterez de vos oreilles, et vous n'entendrez point ; vous regarderez de vos yeux, et vous ne verrez point. (Saint Matthieu, ch. XIII, v. 10 à 14.)

14. Prenez bien garde à ce que vous entendez ; car on se servira envers vous de la même mesure dont vous vous serez servis envers les autres, et il vous sera donné encore davantage ; - car on donnera à celui qui a déjà, et pour celui qui n'a point, on lui ôtera même ce qu'il a. (Saint Marc, ch. IV, v. 24, 25.)

15. «On donne à celui qui a déjà et on retire à celui qui n'a pas ;» méditez ces grands enseignements qui vous ont souvent semblé paradoxaux. Celui qui a reçu est celui qui possède le sens de la parole divine ; il n'a reçu que parce qu'il a tenté de s'en rendre digne, et que le Seigneur, dans sou amour miséricordieux, encourage les efforts qui tendent au bien. Ces efforts soutenus, persévérants, attirent les grâces du Seigneur ; c'est un aimant qui appelle à lui le mieux progressif, les grâces abondantes qui vous rendent forts pour gravir la montagne sainte, au sommet de laquelle est le repos après le travail.

«On ôte à celui qui n'a rien, ou qui a peu ;» prenez ceci comme une opposition figurée. Dieu ne retire pas à ses créatures le bien qu'il a daigné leur faire. Hommes aveugles et sourds ! ouvrez vos intelligences et vos coeurs ; voyez par votre esprit ; entendez par votre âme, et n'interprétez pas d'une manière aussi grossièrement injuste les paroles de celui qui a fait resplendir à vos yeux la justice du Seigneur. Ce n'est pas Dieu qui retire à celui qui avait peu reçu, c'est l'Esprit lui-même qui, prodigue et insouciant, ne sait pas conserver ce qu'il a, et augmenter, en la fécondant, l'obole tombée dans son coeur.

Celui qui ne cultive pas le champ que le travail de son père lui a gagné et dont il hérite, voit ce champ se couvrir d'herbes parasites. Est-ce son père qui lui reprend les récoltes qu'il n'a pas voulu préparer ? S'il a laissé les graines destinées à produire dans ce champ moisir faute de soin, doit-il accuser son père si elles ne produisent rien ? Non, non ; au lieu d'accuser celui qui avait tout préparé pour lui, de reprendre ses dons, qu'il accuse le véritable auteur de ses misères, et qu'alors, repentant et actif, il se mette à l'oeuvre avec courage ; qu'il brise le sol ingrat par l'effort de sa volonté ; qu'il le laboure jusqu'au coeur à l'aide du repentir et de l'espérance ; qu'il y jette avec confiance la graine qu'il aura choisie bonne entre les mauvaises, qu'il l'arrose de son amour et de sa charité, et Dieu, le Dieu d'amour et de charité, donnera à celui qui a déjà reçu. Alors il verra ses efforts couronnés de succès, et un grain en produire cent, et un autre mille. Courage, laboureurs ; prenez vos herses et vos charrues ; labourez vos coeurs ; arrachez-en l'ivraie ; semez-y le bon grain que le Seigneur vous confie, et la rosée d'amour lui fera porter des fruits de charité. (UN ESPRIT AMI. Bordeaux, 1862.)


On reconnaît le chrétien à ses oeuvres


16. «Ceux qui me disent : Seigneur, Seigneur, n'entreront pas tous au royaume des cieux, mais celui-là seul qui fait la volonté de mon Père qui est dans les cieux.»

Ecoutez cette parole du maître, vous tous qui repoussez la doctrine spirite comme une oeuvre du démon. Ouvrez vos oreilles, le moment d'entendre est arrivé.

Suffit-il de porter la livrée du Seigneur pour être un fidèle serviteur ? Suffit-il de dire : «Je suis chrétien,» pour suivre Christ ? Cherchez les vrais chrétiens et vous les reconnaîtrez à leurs oeuvres. «Un bon arbre ne peut porter de mauvais fruits, ni un mauvais arbre porter de bons fruits.» - «Tout arbre qui ne porte pas de bons fruits est coupé et jeté au feu.» Voilà les paroles du maître ; disciples de Christ, comprenez-les bien. Quels sont les fruits que doit porter l'arbre du christianisme, arbre puissant dont les rameaux touffus couvrent de leur ombre une partie du monde, mais n'ont pas encore abrité tous ceux qui doivent se ranger autour de lui ? Les fruits de l'arbre de vie sont des fruits de vie, d'espérance et de foi. Le christianisme, tel qu'on l'a fait depuis bien des siècles, prêche toujours ces divines vertus ; il cherche à répandre ses fruits, mais combien peu les cueillent ! L'arbre est toujours bon, mais les jardiniers sont mauvais. Ils ont voulu le façonner à leur idée ; ils ont voulu le modeler suivant leurs besoins ; ils l'ont taillé, rapetissé, mutilé ; ses branches stériles ne portent pas de mauvais fruits, mais elles n'en portent plus. Le voyageur altéré qui s'arrête sous son ombre pour chercher le fruit d'espérance qui doit lui rendre la force et le courage, n'aperçoit que des branches arides faisant pressentir la tempête. En vain il demande le fruit de vie à l'arbre de vie : les feuilles tombent desséchées ; la main de l'homme les a tant maniées qu'elle les a brûlées !

Ouvrez donc vos oreilles et vos coeurs, mes bien-aimés ! Cultivez cet arbre de vie dont les fruits donnent la vie éternelle. Celui qui l'a planté vous engage à le soigner avec amour, et vous le verrez porter encore avec abondance ses fruits divins. Laissez-le tel que Christ vous l'a donné : ne le mutilez pas ; son ombre immense veut s'étendre sur l'univers : ne raccourcissez pas ses rameaux. Ses fruits bienfaisants tombent en abondance pour soutenir le voyageur altéré qui veut atteindre le but, ne les ramassez pas, ces fruits, pour les enfermer et les laisser pourrir afin qu'ils ne servent à aucun. «Il y a beaucoup d'appelés et peu d'élus ;» c'est qu'il y a des accapareurs pour le pain de vie, comme il y en a souvent pour le pain matériel. Ne vous rangez pas de ce nombre ; l'arbre qui porte de bons fruits doit les répandre pour tous. Allez donc chercher ceux qui sont altérés ; amenez-les sous les rameaux de l'arbre et partagez avec eux l'abri qu'il vous offre. - «On ne cueille pas de raisins sur les épines.» Mes frères, éloignez-vous donc de ceux qui vous appellent pour vous présenter les ronces du chemin, et suivez ceux qui vous conduisent à l'ombre de l'arbre de vie.

Le divin Sauveur, le juste par excellence, l'a dit, et ses paroles ne passeront pas : «Ceux qui me disent : Seigneur, Seigneur, n'entreront pas tous dans le royaume des cieux, mais ceux-là seuls qui font la volonté de mon Père qui est dans les cieux.»

Que le Seigneur de bénédiction vous bénisse ; que le Dieu de lumière vous éclaire ; que l'arbre de vie répande sur vous ses fruits avec abondance ! Croyez et priez. (SIMEON, Bordeaux, 1863.)

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